Les objectifs affichés par les promoteurs pour le projet du GPSO sur leur site lgv2030.fr sont :
- Accélérer les déplacements;
- Appuyer le développement économique des territoires ;
- Améliorer les transports du quotidien ;
- Remplacer les transports actuels par des modes plus écologiques.
Ces objectifs sont peu corrélés à l’implantation d’une LGV. Les arguments des promoteurs du GPSO sont d’ailleurs dénoncés point par point sur le site stoplgv2030.fr. Nous reprenons en synthèse les principaux éléments par objectif affiché :
Accélérer les déplacements
L’objectif étant surtout un gain de vitesse entre Bordeaux et Toulouse (et donc entre Toulouse et Paris) pour connecter les grandes métropoles entre elles, le GPSO projette en effet une certaine performance sur le trajet Bordeaux-Toulouse : un gain de 1h pour les meilleurs temps de trajet (sous-entendu, quand tout se passe bien). Pour la ligne nouvelle Bordeaux-Dax, par contre, le GPSO ne fait gagner que dix à quinze minute par rapport à la ligne existante qui permet déjà de rejoindre les deux villes en 1h05.
Notons toutefois que depuis les années 1990, années des premières ouvertures de Trains à Grande Vitesse, les temps de transports moyens des français n’ont pas évolué. Cela est démontré en graphiques par Aurélien Bigot (slide 13 et suivantes) : le gain de vitesse est compensé par des pertes de temps dans les échanges, trajets intermédiaires (cas des gares betteraves notamment) et attentes en gares ou dans le train (retards, incidents, …).
Voir également cet article de Yves Crozet sur le sujet : « Vitesse vs. ralentissement, en finir avec la recherche du temps perdu ».
Appuyer le développement économique des territoires
En ce qui concerne le développement économique des territoires, il semble que ce soit surtout ciblé celui des métropoles de Bordeaux et de Toulouse. Les conclusions de l’enquête publique de 2015, par les commissaires enquêteurs, ne se privent de le remarquer : « L’objectif affiché et assumé de la grande vitesse est de relier sans arrêts, des grandes métropoles. En conséquence, le développement économique se concentrera autour des gares des deux métropoles et drainera l’emploi au détriment du développement local ».
Rappelons en effet qu’une ligne à grande vitesse s’arrête le moins possible sur son trajet, justement pour atteindre l’objectif sus-mentionné de « vitesse ». La LGV Bordeaux–Paris est un cas d’école, d’après le CESER Nouvelle-Aquitaine lui-même : « les gains d’accessibilité concernent avant tout les Bordelais (…) Pour les autres villes, le tableau est plus mitigé » [Source]
Cependant la validité d’un tel espoir de développement économique est en soi questionnable. Une littérature comparée
permet de rendre compte des fausses idées reçues concernant
le développement économique attendu par les élus suite à l’implantation
d’une ligne à grande vitesse. De plus :
Les études montrent que « plus que de la création d’activités nouvelles, on assiste à de la relocalisation d’activités existantes à proximité du TGV : c’est un jeu à somme quasi nulle » [Yves Crozet, directeur du Laboratoire d’Economie des Transports à l’Université Lyon 2, Usine Nouvelle de juin 2017]. Et ce, pour certains secteurs seulement, le cas du fret étant un gros caillou dans la chaussure. Celui-ci reste bloqué sur la route malgré les constructions de milliers de lignes nouvelles depuis les années 2000 pour proposer des sillons (créneau horaire de circulation de trains) pour le transport de marchandises sur les ‘corridors’ européens. Le secteur de la logistique n’a jamais opéré sa transition, il n’est toujours pas prêt à investir sur le rail.
Surtout, les modes de déplacement et les habitudes des populations sont en pleine mutation depuis le Covid19. Or RFF estimait à l’époque de l’enquête publique qu’il y aurait 9,3 millions de voyageurs supplémentaires sur les lignes ferroviaires grâce au GPSO et en raison d’un trafic induit et d’un trafic déplacé de la route ou du transport aérien. Mais le transport aérien entre Paris et Toulouse est en chute continue depuis 2019, il a perdu 60% de ces voyageurs à 2023. Le bilan économique de RFF est donc caduc : il tablait sur 2,4 millions de voyageurs concernés par des déplacement radiaux à partir de Paris ou passant par Paris, qui aujourd’hui ne se déplacent plus, peut-être en raison de la généralisation de la visioconférence.
Améliorer les transports du quotidien
En ce qui concerne les transports du quotidien, on peine à trouver en quoi le GPSO améliore la situation (voire ne la détériore pas), puisque la LGV Bordeaux-Toulouse ne créerait que deux nouvelles haltes (Agen et Montauban), dont les gares sont situées à 10km du centre-ville (il faudra donc s’y rendre en voiture).
Le réseau actuel de train régional et les TGVs sur les voies existantes assure déjà par ailleurs un maillage du territoire, qu’il s’agirait peut être de mettre à niveau en termes de qualité de service (cf. le bilan de l’Autorité de Régulation des Transports, p29).
Favoriser les modes de transport plus écologiques
Pour preuve de ces objectifs fallacieux, la carte interactive Graou permet de constater en temps réel les trains, TER ou TGV par exemple, circulant sur les lignes existantes, et donc de noter :
- La non saturation des lignes existantes ;
- La possibilité de relier dès aujourd’hui Bordeaux et Toulouse, ou Bordeaux et Dax (i.e. les connexions entre territoires existent, une LGV n’apporte rien de ce point de vue) ;
- Le nombre de retards ou de trains supprimés, c’est-à-dire le besoin prioritaire de mise à niveau du service sur les lignes existantes, avant d’investir sur des lignes nouvelles nécessitant des investissements chiffrés en milliards d’euros qui seront d’autant moins disponibles pour l’entretien des lignes existantes.
En ce qui concerne les aménagements ferroviaires, spécifiquement
Leur objectif est de faciliter l’accès des LGVs au coeur des métropoles de Bordeaux et de Toulouse. Les arguments vantant les externalités positives sur les TER et trains du quotidien de ces aménagements sont de mauvaise foi, les LGVs étant prioritaires et les TER devant se « garer » sur la 3e voie prévue, afin de les laisser passer.
De plus, justifier des aménagements ferroviaire en prétextant des externalités positives sur les trains du quotidien n’est pas du même acabit qu’un investissement massif sur la mise à niveau des lignes existantes et des TER en particulier. Or les près de 1 milliards d’euros consacrés aux aménagements sont déjà la somme qu’il faudrait consacrer au budget d’entretien et d’amélioration des infrastructures actuelles.